Le juge Ibrahima Sory 2 Tounkara a décidé de renvoyer au 28 novembre 2023, l’audition des témoins dans le cadre du procès du massacre du 28 septembre 2009.
Cette décision fait suite à la demande des avocats de la défense qui ont décidé de suspendre leur participation jusqu’à ce qu’ils puissent avoir accès à leurs clients, détenus à la Maison centrale de Conakry. Ils exigent des autorités judiciaires leur accès à la maison d’arrêt de Conakry « sans entrave ».
« Il vous souviendra qu’à l’audience du lundi qui a précédé la semaine dernière, on a relevé des faits auxquels nous sommes confrontés depuis les événements du 04 novembre qui ont effectivement occasionné l’attaque de la maison centrale et l’enlèvement d’un de nos clients.
Depuis cette date, les avocats que nous sommes, n’avons pas accès à nos clients à la maison d’arrêt. Il vous souviendra monsieur le président que parmi les accusés, beaucoup ont été placés en détention provisoire jusqu’au jugement et d’autres se sont constitués prisonniers à l’ouverture de cette procédure. Le seul endroit où nous, avocats, pouvons rencontrer nos clients pour discuter dans le cadre de la préparation de leur défense dans la présente procédure, c’est la maison d’arrêt. Ils sont privés de leur liberté. D’autres par le fait d’une décision de justice, d’autres par leurs propres faits. Mais à partir de ce moment-là, ils ne sont plus libres d’eux-mêmes et nous qui les conseillons, si nous devons participer à cette procédure, il ne s’agit pas d’une participation passive. La participation doit être active. Nous avons entamé une phase qui consiste à l’audition des témoins, qui est une phase cruciale, une phase de la discussion des preuves et les personnes qui comparaissent ici en tant que témoin, se sont des personnes, qui, à un moment donné ont collaboré avec nos clients où qui ont d’une manière ou d’une autre, des interférences avec nos clients. La personnalité des personnes qui comparaissent, ces témoins, ce qu’ils diront, ce qu’ils feront aura un impact effectivement sur le sort de nos clients. Nous ne voulons pas, en tant qu´avocats de la défense, que ce procès soit le résumé de la vie de quelqu’un. Si nous avons décidé de les défendre, nous devons faire en sorte que les déclarations qui seront faites à cette barre que les droits de nos clients soient respectés. C’est pour ça, le collectif m’a mandaté auprès de vous, monsieur le président pour faire passer notre message qui est celui de vous notifier la décision que nous avons prise à notre niveau de suspendre d’abord notre participation dans le cadre de ce procès jusqu’à ce que les droits les plus élémentaires de nos clients soient respectés », a expliqué Me Almamy Samory Traoré devant le tribunal.
Le parquet a promis de s’employer davantage pour faciliter la demande des avocats de la défense dès aujourd’hui.
«Du côté parquet nous sommes quelque peu surpris que cela ne soit pas porté de manière formelle à l’attention de votre juridiction. Nul n’ignore qu’à la nuit du 04 novembre il y’a eu un événement inédit à la maison centrale de Conakry qui a conduit à l’exfiltration de 4 accusés dans ce procès. Pouvons-nous rester avec le statiquo hanté, ne pas prendre des dispositions, pour ne pas que cela arrive à nouveau ? Je dis non. Les dispositions sécuritaires ont été prises à la maison centrale de Conakry. À l’occasion d’une de vos audiences ici, les conseils des accusés ont effleuré cette question pour dire qu’ils rencontraient des difficultés pour avoir accès à leurs clients. Ils ne vous avaient pas dit qu’ils ne rencontraient pas leurs clients. Ce n’est qu’hier, par un communiqué non signé, par voie de presse que la plupart d’entre nous ont appris que les avocats entendent boycotter les audiences jusqu’à ce qu’ils aient accès à leurs clients. C’est un procès d’envergure, je rappelle à tout moment que nous devons tous savoir raison gardée. On aurait dû saisir votre tribunal, pour exposer de manière claire cette inquiétude-là, pour vous dire clairement qu’ils ne rencontraient pas leurs clients. À présent que cela a été fait, les droits de la défense étant sacrés, nous côté parquet, nous nous emploierons à ce que les avocats constitués pour la défense des accusés aient accès à leurs clients au sein de l’univers carcéral et ça dès aujourd’hui», a fait savoir le procureur Alghassimou Diallo.
Faut-il rappeler que le 4 novembre 2023, Moussa Dadis, l’ex chef de la junte au moment des faits, le colonel Moussa Tiegboro Camara, colonel Blaise Goumou et le colonel Claude Pivi, tous accusés dans ce procès, ont été exfiltrés à Maison centrale de Cponakry par un commando. Les trois premiers ont été arrêtés et reconduits en prison tandis que le dernier (Pivi) est toujours en cavale. Depuis, les autorités ont renforcé le dispositif sécurité à la prison centrale pour éviter la récidive de cet acte qui risquerait d’entraver l’évolution du procès.