La chambre de jugement de la Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF) a rejeté ce lundi 27 mars 2023, les questions préjudicielles soulevées par l’ancien ministre de la Défense nationale, Dr Mohamed Diané.
Le prévenu avait soulevé entre autres l’effet suspensif du pourvoi en cassation pendent à la Cour Suprême, exercé contre l’ordonnance de renvoi devant la chambre de jugement.
Le président Francis Kova Zoumanigui a rejeté cette demande au motif que la décision de la Cour Suprême ne modifiera en rien le caractère infractionnel des faits poursuivis.
Cela a sonné comme un coup de tonnerre pour la défense du Dr Diané. L’avocat de la défense estime que le président de la chambre n’a pas le droit d’apprécier ou non le pourvoi.
« La défense se retire. On n’a pas le courage moral de plaider devant une justice à laquelle on ne fait pas confiance, devant une justice qui a le droit de se substituer à la Cour Suprême. L’irrecevabilité du pourvoi dépend uniquement de la Cour Suprême. Donc, la défense se retire et ils n’ont qu’à juger Dr Diané sous silence. Nous n’allons pas participer à ce débat. C’est une honte, le droit a sombré. C’est extrêmement grave qu’un juge d’une juridiction spéciale de second degré, puisse remplacer celle de cassation. Ce sont des manipulations ça ne marchera pas. Il n’y aura pas de procès de spectacle comme ils veulent », a déclaré Me Sidiki Bérété, l’un de ses conseils.
Après la décision de ses conseils de jeter l’éponge, Dr Mohamed Diané envisage de garder le silence. S’adressant au président de la chambre de jugement, il indique qu’il n’a rien à dire après le retrait de ses avocats dans la procédure: « Monsieur le président, avec tout le respect que je vous dois, avec le désistement de mes avocats, je n’ai plus rien à dire ».
Pour la partie civile, l’accusé a droit à un avocat. Par conséquent, elle invite le président à commettre un ou des avocats d’office pour assurer la défense du prévenu.
Par ailleurs, Me Pépé Antoine Lamah, avocat de la partie civile indique que « c’est la continuité de la démarche du Dr Mohamed Diané et sa défense qui veulent à tout prix, par tous les moyens, faire en sorte que ce procès ne se tienne pas. »
Dr Mohamed Diané utilise des prête-noms ?
C’est une thèse soutenue par l’avocat de l’État guinéen dans cette affaire. Il accuse Dr Mohamed Diané d’avoir utilisé des personnes comme propriétaires de ses propres biens.
« Depuis l’instruction, on a pu saisir qu’un seul immeuble appartenant à Dr Mohamed Diané à Conakry. Tous les autres sont situés dans la région de Kankan. Pourtant, il en a en abondance à Conakry. Il ne peut pas dire à la barre de cette Cour que même où il loge à Petit Simbaya (Ratoma ndlr) il est en location. Monsieur le président, vous allez constater avec moi que même les immeubles (du prévenu ndlr) saisis à Kankan, tous, ne sont pas au nom du Dr Mohamed Diané. Il a fait des prête-noms et c’est le cas également à Conakry. Et, pour la plupart de ses immeubles, il a utilisé le nom : Assé Diané. Nous avons mis main sur la copie d’un titre foncier que nous avons produite à l’instruction portant sur la parcelle numéro 5 du lot 80 de Conakry 1 Commune de Kaloum, d’une superficie de 705,91 m2, objet du titre foncier Nº24440/2019/TF du 18 décembre 2019. Ce n’est pas la seule, monsieur le président, il y en a plusieurs avec le même nom », révèle l’avocat.
« Nous vous prions en attendant qu’il lui soit commis d’office un avocat ou des avocats qui vont assurer sérieusement sa défense que la Cour ordonne la saisie conservatoire de la parcelle objet du titre foncier dont je viens de lire les références et de même que tous les immeubles à Conakry et l’intérieur du pays immatriculés au nom de Assé Diané. Si cette mesure est ordonnée vous verrez à la suite si le nommé Assé Diané osera comparaître pour revendiquer la propriété de cet immeuble. En le faisant, vous aurez contribué à la manifestation de la vérité », ajoute-t-il.
Le juge a renvoyé cette affaire au 17 avril 2023 pour la commission d’avocats d’office pour le prévenu et il statuera également à cette date sur la demande de la partie civile.