En marge de la Conférence académique 2025 sur l’Afrique, tenue récemment au siège des Nations Unies, la conseillère spéciale de l’ONU pour l’Afrique, Cristina Duarte, a livré une analyse sans détour des défis du continent, lors d’un entretien accordé à ONU Info.
Interrogée sur les principaux enseignements issus de cette rencontre académique, la responsable onusienne a d’emblée insisté sur ce qu’elle considère comme le cœur du problème africain. « Premier enseignement : il faut reconnaître que l’Afrique n’a pas un million de problèmes. Selon moi, l’Afrique n’a qu’un seul problème : un problème de mentalité. Une fois que nous aurons changé cette mentalité et valorisé le savoir africain comme fondement du développement, tout le reste suivra une nouvelle direction», a-t-elle affirmé.
Cristina Duarte a ensuite évoqué les défis institutionnels persistants du continent. « Deuxième enseignement : il faut reconnaître que l’Afrique, malgré près de 60 ans d’indépendance, est malheureusement confrontée à un défi de construction nationale, un défi de construction étatique », a-t-elle souligné, pointant les fragilités structurelles qui continuent de freiner le développement.
La question de la maîtrise des ressources constitue, selon elle, un autre enjeu central. « Troisième enseignement : l’Afrique doit maîtriser ses propres ressources. Bien que l’Afrique soit confrontée à un endettement important, elle n’est pas pour autant un pays surendetté. La raison de ce surendettement est que l’Afrique ne maîtrise pas ses flux économiques et financiers », a expliqué la conseillère spéciale.
Revenant plus précisément sur la notion de « mentalité » à transformer, Cristina Duarte a critiqué la tendance des dirigeants africains à se tourner systématiquement vers l’extérieur. « Trop souvent, les décideurs politiques africains se tournent vers l’extérieur – pour obtenir des prêts, de l’aide ou des investissements – avant de se tourner vers l’intérieur », a-t-elle regretté.
Elle a également mis en lumière l’ampleur des pertes financières subies par le continent. « Chaque jour, l’Afrique perd environ 1,4 milliard de dollars, soit 500 milliards de dollars par an, en raison d’inefficacités et de fuites de capitaux. Pourtant, nous continuons de prioriser l’Aide publique au développement (APD) […], qui représente à peine 10 % de ce montant », a-t-elle indiqué.
Pour la conseillère spéciale de l’ONU pour l’Afrique, un changement de paradigme s’impose. « Notre modèle de développement doit évoluer : il ne s’agit plus de dépendre de l’aide extérieure, mais de mobiliser les ressources nationales, non pas en augmentant les impôts, mais en utilisant plus efficacement les ressources existantes », a-t-elle conclu.
