Dans cette interview, l’écrivain guinéen Mamadou Aguibou Sow, plus connu sous le nom littéraire “Mo Kuletee”, parle de son dernier roman en pular intitulé « Waaweede ». Il y explique que son objectif est de décrire la réalité telle qu’elle est, sans porter de critique acerbe, et de laisser les lecteurs juger. Il détaille également la structure de son roman et les thèmes qu’il aborde tels que la justice, l’éducation, la formation, le voyage, l’immigration clandestine et le chômage. Mo Kuletee évoque également ses autres ouvrages et la différence entre eux et son dernier roman. Il souligne l’importance de produire de la littérature dans les langues africaines pour préserver leur vitalité.
Guinee360 : Qu’est-ce qui vous a motivé à écrire ce roman, surtout en version pular ?
Mo Kuletee : Ma motivation vient de loin. Je suis enseignant de français et promoteur des langues nationales, dont le pular, ma langue maternelle. Cela m’a amené à écrire, et ce n’est pas ma première édition, je suis à ma huitième. C’est pourquoi j’ai décidé de publier cette fois-ci en pular.
Est-ce que vous voulez dire que tous vos livres sont écrits en pular ?
La plupart de mes livres sont en pular. J’en ai deux qui sont bilingues français-pular, il s’agit de recueils de contes, et un lexique de sciences mathématiques et de la vie.
En écrivant un livre ou un roman, on rencontre souvent des difficultés. Est-ce que vous en avez rencontré également ?
Oui, il y a toujours des difficultés lorsqu’on écrit un livre, mais écrire dans sa propre langue permet de réduire ces difficultés car on réfléchit dans sa langue et on produit dans sa langue. Les difficultés se situent plutôt au niveau de l’édition et du lectorat. Cependant, je pense que le nombre de lecteurs pularophones est en augmentation, ce qui va permettre de surmonter ces difficultés.
Quel est le contenu de ce roman “Waaweede” ?
En écrivant ce roman, je décris ma communauté, mon environnement, ma société, ainsi que mon vécu et mon histoire en tant que Peul. Je parle de la canne du berger, de la calebasse de la bergère et de tout ce qui nous entoure. En somme, je décris ce qui fait notre quotidien.
Quel est le message dans ce roman ?
Le message du roman est peut-être différent de ce que la plupart des auteurs cherchent à transmettre. Au lieu de chercher à imposer un point de vue, je me contente de décrire ce qui est réel. Les lecteurs peuvent ainsi juger si les événements décrits sont justes ou s’ils auraient dû être différents. Je ne fais pas de critique acerbe, mais je décris simplement une expérience vécue. L’histoire tourne autour d’un journaliste qui se retrouve dans une situation juridique compliquée alors qu’il couvrait une campagne agricole. Il est injustement arrêté par un sous-préfet et condamné en dépit de la loi. Cette situation le conduit à travers plusieurs niveaux de justice, depuis la sous-préfecture jusqu’au gouvernorat et à la capitale, avec en prime des marches pacifiques qui dégénèrent en fusillades et des pertes d’emplois. J’essaie ainsi de partir d’un fait divers pour développer toute une histoire.
Comment est structuré le roman ?
Le roman suit une structure classique, comme la plupart des autres romans. Il est constitué de 94 pages, couverture non comprise. Il respecte donc les règles de l’écriture romanesque, même s’il est écrit en pular.
Quels sont les thèmes abordés dans ce roman ?
Les thèmes abordés dans ce roman incluent la justice, l’éducation, la formation, le voyage, l’immigration clandestine et le chômage. Ce sont des problèmes qui touchent de nombreux pays, y compris la Guinée, et que j’ai voulu mettre en lumière à travers ce récit.
En quoi ce roman diffère-t-il de vos précédents livres ?
La principale différence est que ce livre est un roman, alors que mes précédents ouvrages étaient des recueils de poèmes, de nouvelles, de théâtre et de contes.
Avez-vous eu du succès avec vos précédents livres ?
Oui, j’avance pas à pas. J’ai commencé par des poèmes, qui sont des textes courts et faciles à emporter. Ensuite, j’ai publié des nouvelles, qui sont également courtes mais plus développées. Enfin, je suis passé au roman, qui est un format plus long. Je pense que j’ai ainsi progressé de manière graduelle.
Avez-vous un dernier mot pour les lecteurs ?
Je souhaite rappeler à tous ceux qui liront cet article que si nous, les locuteurs des langues guinéennes africaines, ne produisons pas nous-mêmes de la littérature dans notre langue, personne ne le fera pour nous. Nous avons donc tout intérêt à développer une production littéraire en langues guinéennes. Cela peut aider à sauvegarder nos langues, qui sont menacées dans certains endroits.