À quelques heures de la fin de la campagne présidentielle en Guinée, prévue pour le 28 décembre, un malaise persistant s’impose dans le paysage médiatique. Moins tendue que les précédentes sur le plan de l’animation politique, la campagne de 2025 aura néanmoins mis en lumière une dérive préoccupante : l’affichage assumé du militantisme de certains journalistes dans la couverture électorale.
Sur le terrain comme sur les plateaux, des professionnels des médias, pourtant tenus à un strict devoir de neutralité, se sont illustrés par des postures incompatibles avec les principes fondamentaux du métier. T-shirts, casquettes, effigies de candidats, applaudissements et démonstrations de soutien politique ont parfois remplacé la distance professionnelle attendue d’un journaliste. Cette situation tranche avec les pratiques observées lors des campagnes antérieures.
Par le passé, notamment lors de la présidentielle de 2010 et de 2015, des reporters étaient certes désignés pour accompagner des candidats dans leurs déplacements, mais sans afficher publiquement une quelconque appartenance politique. La couverture électorale se faisait alors dans une relative retenue, respectueuse de l’éthique et de la déontologie.
La rupture constatée cette année interroge d’autant plus qu’elle survient sous le regard impuissant de la Haute Autorité de la Communication (HAC), pourtant engagée dans une démarche d’assainissement du secteur des médias.
Si l’organe de régulation multiplie les exigences en matière de professionnalisme, de rigueur et de respect des textes, la question de la neutralité journalistique semble, pour l’heure, reléguée au second plan.
Certes, tous les journalistes ne sont pas logés à la même enseigne. Certains ont su préserver leur indépendance et produire un travail conforme aux standards professionnels. Mais le constat global reste préoccupant : une frange visible de la corporation n’a pas hésité à se confondre avec les militants, brouillant ainsi la frontière entre information et engagement politique.
Pour plusieurs observateurs, cette dérive s’explique par le contexte difficile que traverse la presse guinéenne, marqué par la fermeture de médias et la précarisation des acteurs. D’autres y voient les effets du rapprochement assumé de certains journalistes, parfois influents, avec les cercles politiques.
Quelles qu’en soient les raisons, l’enjeu demeure central. Dans une démocratie, le journaliste n’est ni militant ni acteur politique.
En renonçant à cette exigence, c’est la crédibilité de l’ensemble de la profession qui se trouve fragilisée, au risque d’éroder davantage la confiance du public dans l’information.
