Le nouveau Code électoral, récemment promulgué par le président de la transition, le général Mamadi Doumbouya, continue de susciter des débats. Plusieurs juristes, praticiens du droit et acteurs politiques interrogent certaines de ses dispositions. Parmi eux, Me Almamy Samory Traoré, avocat au barreau de Guinée, qui a publié une analyse approfondie du texte.
Dans une publication sur sa page Facebook, l’avocat attire l’attention sur des articles qu’il juge contraires à la Constitution. Pour lui, « le nouveau Code électoral guinéen à l’épreuve de la Constitution » risque de provoquer de nombreuses discussions juridiques. « Le contentieux électoral à venir en Guinée s’annonce particulièrement riche en débats de droit », écrit-il.
Me Traoré pointe notamment du doigt l’article 15, alinéa 2, qui stipule que « les personnes faisant l’objet d’un mandat d’arrêt national ou international ne sont pas éligibles à la fonction de Président de la République ». Selon lui, cette disposition viole le principe de la présomption d’innocence garanti par la Constitution. « Rendre inéligible un individu sur la seule base d’un mandat d’arrêt, sans condamnation définitive, revient à substituer le soupçon à la preuve et à faire prévaloir le préjugé sur le droit », explique-t-il.
L’avocat estime qu’une telle mesure crée une inégalité entre les citoyens et menace les fondements de l’État de droit. « Une telle approche ne fragilise pas seulement la cohérence de l’ordre juridique ; elle menace également l’équilibre entre l’État de droit et la volonté politique de moraliser la vie publique », ajoute-t-il.
Évoquant les voies de recours possibles, Me Traoré souligne qu’« un candidat placé sous le coup d’un mandat d’arrêt national ou international, dont la candidature serait rejetée pour ce motif, pourrait saisir la juridiction compétente afin de soulever l’inconstitutionnalité de cette disposition du Code électoral».
Il anticipe d’ailleurs une saisine prochaine de la Cour constitutionnelle : « Il ne serait donc pas surprenant que ce texte fasse l’objet de vives contestations devant la Cour constitutionnelle », indique-t-il, avant de rappeler que « les praticiens du droit, et plus particulièrement les avocats, auront alors la lourde responsabilité de soulever les nombreuses exceptions d’inconstitutionnalité qui ne manqueront pas de surgir ».
Enfin, Me Traoré réaffirme le rôle fondamental du barreau dans la défense des libertés publiques. « L’avocat, rappelons-le, n’est pas législateur. Mais il demeure, dans un État de droit, le gardien vigilant de la légalité et le défenseur naturel des libertés fondamentales », souligne-t-il.
Par cette analyse, Me Almamy Samory Traoré met en garde contre le risque que certaines dispositions du nouveau Code électoral portent atteinte aux droits garantis par la Constitution du 21 septembre dernier. Son intervention relance le débat sur la conciliation entre la lutte contre l’impunité et le respect des principes fondamentaux de la justice en Guinée.