À Kiroty Marché, dans la commune de Lambandji, les habitants n’en peuvent plus. La zone de tri des déchets, implantée au cœur du quartier, est devenue au fil du temps un véritable dépotoir à ciel ouvert. Les populations locales craignent de voir leur environnement se transformer en une décharge semblable à celle tristement célèbre de Dar-es-Salam.
Il est dix heures du matin. Sous un soleil déjà ardent, les commerçants et vendeuses de riz commencent à ouvrir leurs boutiques installées le long de la route, à quelques mètres seulement de la zone de tri. À proximité, les amas d’ordures dégagent une odeur nauséabonde.
Les mouches bourdonnent autour des étals.
Dans son magasin de pièces détachées qui fait face à la décharge, Mamoudou Barry tente de respirer tant bien que mal. Pour lui, la situation est devenue invivable.
“Le problème, c’est qu’on ne peut même pas manger tranquillement ici. Pendant la saison des pluies, l’odeur est telle qu’elle semble entrer jusque dans le corps. Eh bien, surtout pendant la saison pluvieuse, c’est insupportable. On ne peut pas supporter l’odeur ni la saleté. La vie est vraiment difficile ici. Franchement, un être humain ne peut pas vivre dans ces conditions. Si tu restes ici, tu es obligé de porter un masque, c’est indispensable. On sait qu’on risque notre santé. Avec cette odeur et cette saleté, on n’est pas à l’abri.”
Le commerçant lance un appel pressant aux autorités.
“Je demande aux autorités de penser à la population. Cet endroit n’est pas fait pour ça. Il y a un stade ici, des hôtels vont s’installer, et cette situation donne une très mauvaise image. On leur demande de nous aider à faire dégager ces ordures. Ils ont le pouvoir de le faire. Nous leur demandons cela humblement.”
Non loin de là, Dame Ramata, vendeuse de fonio, a dû changer ses habitudes. Autrefois, elle recevait ses clients dans sa cour. Aujourd’hui, l’insalubrité la contraint à se déplacer pour écouler sa marchandise.
“Nous souffrons ici énormément à cause de ces ordures. Après la cuisine, on ne peut même pas s’asseoir au dehors pour manger, il nous faut rentrer à l’intérieur de la maison. Je prépare du riz et du fonio que je vends ici. Avant, j’avais beaucoup de clients. Actuellement, à cause des odeurs et des tas d’immondices, je perds la clientèle. Dès que tu enlèves le couvercle de la marmite, les mouches viennent se poser dans la sauce. Présentement quand je termine la cuisine, je pars vendre dans le marché. Nous lançons un appel aux autorités de nous venir vraiment en aide à cause de Dieu, puisqu’on a trop souffert, et souffrons avec ces ordures.”
Selon plusieurs habitants, une grande partie des déchets déversés ici viendrait de Cosa, Petit Simbaya et Flamboyant. Les ordures y sont transportées puis abandonnées sur ce site, à quelques mètres des habitations et des commerces.
Assis devant un kiosque, un café à la main, Amadou fulmine contre la dégradation du cadre de vie.
“Au début, cet endroit avait été prévu pour abriter une zone de recyclage de déchets mais aujourd’hui c’est presque devenu une décharge. Depuis deux ans nous vivons avec ces ordures qui dégagent des odeurs nauséabondes. Nous avons alerté les autorités compétentes pour trouver une solution, nous sommes même allés à la mairie pour dénoncer cela mais en vain. Tous les jours les citoyens sont malades ici. Ce sont les vies de milliers de personnes qui sont exposées ici. Nous interpellons le gouvernement afin de prendre des mesures pour sauver des vies.”
Du côté de la mairie de Lambandji, les responsables évoquent un manque de moyens logistiques, notamment l’insuffisance de camions pour le transport des déchets. Malgré leur bonne volonté, ils disent être confrontés à des difficultés matérielles qui freinent la gestion efficace de la salubrité publique.
En attendant une réponse concrète des autorités, les habitants de Kiroty Marché continuent de vivre au milieu des ordures, entre odeurs pestilentielles et risques sanitaires surtout que cette décharge se trouve à quelques mètres du centre de santé de la localité et du grand marché.

