Après 100 jours de gestion à la primature, il y a lieu de parler de la gestion de Ibrahima Kassory Fofana. Dans cette interview, le Directeur exécutif de African Crisis Group a abordé cette gestion du Premier ministre ainsi que plusieurs sujets qui font l’actualité nationale,notamment, l’affaire 21milions USD qui auraient été détournés à la BCRG.
Guinée360 : quel bilan tirez-vous des 100 premiers jours de Kassory Fofana à la Primature ?
Dr Sékou Koureissy Condé: Je pense qu’il y a une ambition qui est affichée par le premier ministre. Il y a des intentions qui sont connues. Cent jours ne suffisent pas pour dressez un bilan dans le contexte guinéen actuellement. L’état dans lequel il a pris fonction, à mon avis, 100 jours ne suffisent pas fixer toutes les limites d’une réalisation. Mais, il y a un engagement qui est pris et je pense que le ministre Kassory, sur la base des ses fonctions, de son expérience, de son parcours et sur la base des résultats économiques auxquels il est parvenu dans ce pays est, dans ce domaine là, l’un des plus qualifiés en terme de perspective de développement, en terme de projet de développement. C’est vrai que l’état de pauvreté dans lequel le pays se trouve, nous avons le droit d’être impartial et nous avons le droit d’attendre beaucoup du gouvernement. Il est du devoir du gouvernement d’accélérer le processus de développement et de mise en valeur des atouts que nous avons surtout des atouts humains. C’est sur ce point j’attends le Premier ministre pour qu’il fasse de la réconciliation, de la résolution des conflits, de la consolidation de la paix un atout majeur. Sinon, pour le reste, je pense qu’il a une ambition et nous pouvons espérer que les crises vont se tempérer et que nous allons rentrer dans la phase de travail. Il y a de l’espoir.
Dès sa nomination, le Premier ministre avait promis de lutter contre la corruption dans le pays. Est-ce qu’il y a eu des actes posés dans ce sens ?
Je souhaite qu’il puisse faire fasse à la corruption. Je sais qu’il est très porté vers la lutte contre la corruption et je sais qu’il le pense très sincèrement. Le contexte est très difficile parce que c’est le système même qui est corrompu. Il y a une corruption de valeur. Donc lorsqu’on est dans un système et qu’on se batte contre les difficultés et les handicaps de ce système, il faut l’appui intérieur et extérieur. Souhaitons qu’il y ait cet appui et cet accompagnement pour que sa volonté puisse être portée sur la moralisation.
Que pensez-vous de l’assainissement mensuel qu’il a instauré les derniers samedis?
Je pense que c’est symbolique. C’est pas le regroupement des citoyens par semaine qui va faire le nettoyage, la propreté…c’est pas de ça qu’il s’agit. Mais il s’agit d’un acte psychologique. Il faut que les citoyens sachent que c’est d’abord à nous d’être propres. C’est à nous d’apporter la propreté devant nos portes. Au Sénégal, quand vous demandez à un citoyens, il sait qu’il est interdit de mettre les ordures devant sa porte. Vous voyez les autorités, les responsables de jeunes, les organisations non gouvernementales, les membres du gouvernement de votre pays se mobiliser pour nettoyer, en attendant que les grandes entreprises de nettoyage n’interviennent, je pense que c’est salutaire. Il y a deux chantiers pour la mise en œuvre d’un travail de propreté et de nettoyage dans une vie. Il y a ce que le citoyen doit faire, je pense que c’est le symbolique là que le premier ministre à engager. Et il y a ce que le gouvernement doit faire en amenant les entreprises, en responsabilisant les municipalités pour faire face à leur responsabilité. Donc, je ne dirais pas que c’est un mauvais acte. Je dirai que ça ne suffit pas.
Que pensez-vous de cette affaire de 21 millions Usd qui éclabousse la Bcrg ?
Jusqu’à bénéfice d’inventaire, il faut considérer que c’est faux. La Société civile regrette l’utilisation de médias intérieurs et extérieurs dans les basses querelles d’intérêts. Comment peut on se baser sur une lettre anonyme pour affirmer qu’il y a eu un détournement. Le simple bon sens exige l’investigation approfondie, l’écoute des toutes les parties, le recoupement des informations. Il ne faut pas se fier sur une seule information sans vérification surtout lorsque la source est douteuse. En tant que citoyen épris de justice et de paix, et directeur exécutif de l’African crisis group, je suis sous la pression des demandes de plusieurs cabinets internationaux de transparence et de bonne gouvernance par rapport à cette question. Après avoir échangé et écouté toutes les parties concernées, je suis arrivé à la conclusion selon laquelle et les médias et certains responsables politiques sont tous victimes d’une vaste et intelligente manipulation. Je suis profondément attaché à l’impartialité, à l’objectivité et à la justice. C’est mon attachement à ces valeurs qui me vaut aujourd’hui cette position et toutes ces sollicitations au niveau international en tant que directeur exécutif de l’African crisis group. Je n’ai pas de leçon à donner, mais ce que je demande à mes compatriotes c’est faire en sorte de reconstruire la conscience nationale. C’est-à-dire les limites à ne pas franchir lorsqu’il s’agit de la patrie. Une banque centrale est un patrimoine , une institution de prestige et c’est la vitrine financière internationale de notre pays. Nous sommes l’un des pays rares pays en Afrique qui depuis l’indépendance tient à sa monnaie nationale : le Syli et ensuite le Franc guinéen. De ce point de vue, la monnaie et la Bcrg sont symboles de souveraineté. Dans ce cas précis lorsque la responsabilité d’un citoyen est engagée je préfère porter plainte. En pareille circonstance, il faut tenir compte aussi de l’image et de la crédibilité de notre pays face aux partenaires économiques et financiers. Je suis acteur de la Société civile, je ne suis pas avocat d’un régime. Mais je dois avoir le courage de la vérité et de l’impartialité pour l’intérêt supérieur de la nation.
L’opposition accuse l’Etat de retarder l’installation des conseillers communaux après la signature d’un accord politique mettant fin le contentieux électoral. Quel est votre avis ?
Mais non, pas de mauvaise volonté du pouvoir. C’est l’échec d’un processus politique concocté par le pouvoir et l’opposition. Les accords du mois d’octobre 2016 au point 2 qui renvoyaient les responsabilités de la désignation des responsables locaux au parti majoritaire dans la zone concernée. En tant que société civile, nous avons dit ce n’est pas bon. Non seulement, ils sont tombés d’accord, mais le parlement à légiféré et a accepté cette modification et le juge constitutionnel a accepté la modification. Aujourd’hui. Nous payons le prix. Il faut absolument être capable de relire ce qu’on a fait. Il faut faire en sorte que le pays là puisse sortir de l’hésitation, de la suspicion, du manque de confiance. Je souhaite que les conseillers communaux soient installés le plutôt que possible après la signature des accords au QG de l’UFDG. En tant que société civile, nous ferons une déclaration dans ce sens dans les jours à venir.
A Kindia, le premier imam de la commune urbaine et également le Kountigui de la Basse Côte, Elhadj Sékhouna Soumah se sont opposés à l’accord politique. Ils contestent le maire élu et réclame un originaire de la localité. Comment réagissez-vous face à ces déclarations ?
Moi, je pense qu’ici on exagère. Le grand imam, c’est vrai, c’est un chef religieux mais c’est un citoyen. Il n’a dit que son opinion par rapport à la loi. Donc, appliquons la loi et donnons aux personnes, quelque soit leur statut, le bénéfice de la simple citoyenneté, de l’opinion citoyenne. Il ne faut pas en faire une situation insupportable. Les partis politiques sont consacrés par la constitution, ils ont une responsabilité. Les citoyens ont des devoirs et des droits. C’est un citoyen qui s’est exprimé. Cela nous interpelle tous, c’est l’opinion d’un citoyen. N’en faisons pas une affaire d’Etat. Elhadj Cellou Dalein Diallo est le chef de file de l’opposition, président de l’UFDG, mais face à Alpha Condé c’est un simple citoyen. A plus forte raison un imam. Il n’est pas un élu. Il a donné son point de vue. Il nous appartient de trouver un point de vue contraire sur la base des réalités et du contexte national. Force reste à la loi.
On constate une division au sein des Forces sociales. Au Lendemain de la prestation de serment du groupe d’Abdourahmane Sano, un autre groupe est sorti pour dénoncer une volonté de caporalisation le mouvement. A votre avis qu’est ce qui explique cela ?
Je pense qu’Abdourahmane Sano a tort. Il y a une véritable transition générationnelle. Il y a des jeunes leaders aujourd’hui qu’il faut accompagner dans cette dynamique. En réalité, l’interprétation que je fais de la création des forces sociales c’est l’émergence d’une couche jeune. C’est pas seulement le prix du pétrole, mais il y avait un vide. On disait que les acteurs de la société civile ne s’entendent pas. Les jeunes sont venus nous réveiller dans l’union, l’entente et la solidarité. Moi, je pense que c’est le résultat le plus important. Qu’on crée par décret une coordination avec prestation de serment, je pense que ce n’est plus société civile.