Sitôt la nouvelle Constitution promulguée après la publication des résultats définitifs, le calendrier électoral s’accélère en Guinée avec l’annonce d’une présidentielle fixée au 28 décembre 2025. Pour Édouard Zoutomou Kpogomou, leader de l’UDRP, cette précipitation n’est pas neutre : elle viserait à exclure certains leaders politiques du scrutin et à maintenir l’incertitude sur le jeu électoral.
Guinee360.com : Comment réagissez-vous à la célérité avec laquelle le gouvernement a promulgué, dès après la publication des résultats définitifs, la nouvelle Constitution?
Édouard Zoutomou Kpogomou : Nous ne sommes pas surpris de la rapidité avec laquelle les choses se passent. Ce qui est certain, c’est qu’on ne veut pas laisser trop de temps, afin d’éviter des découvertes de tripatouillage, de bourrages ou d’irrégularités pouvant susciter des contestations. Nous ne sommes pas surpris, car il fallait que les choses aillent vite. C’est la raison pour laquelle il y a eu, coup sur coup, la proclamation des résultats et l’annonce de la date de l’élection présidentielle. Or, à l’origine, il avait été annoncé que l’on suivrait l’ordre des élections locales jusqu’à la présidentielle. Soudainement, il a été question des législatives et de la présidentielle, et maintenant il semble que l’on soit focalisé uniquement sur la présidentielle. Pour nous, après le référendum, il aurait fallu prendre le temps de consulter les bases. C’est ce que nous allons faire à l’UDRP : convoquer nos militants, les consulter et, à partir de là, définir notre position.
Il y a eu aussi l’adoption et la promulgation, en moins de 24 heures, d’un nouveau Code électoral. Même si aucune copie n’a circulé, un décret en a annoncé la promulgation. Qu’en savez-vous ?
Normalement, ce sont des documents publics qui doivent circuler. Nous n’avons pas à aller les chercher : ceux qui les adoptent doivent les mettre à disposition des formations politiques et du peuple. S’ils gardent ce document, nous ignorons leurs raisons. Dans tous les cas, même si le Code électoral a été publié, les conditions de visibilité ne sont pas encore clairement élucidées. Cela doit être porté à la connaissance de la population avant toute décision. Une question fondamentale reste la position du général Doumbouya sur l’élection présidentielle. Tant que ce n’est pas clarifié, on va droit dans le mur. Il y a déjà eu beaucoup d’achats de conscience ; il est donc difficile de se prononcer sans savoir ce que le général compte faire.
Si la présidentielle se tient à la date du 28 décembre 2025, certains candidats sont frappés d’inéligibilité : Sidya Touré pour dépassement de l’âge limite, Cellou Dalein Diallo parce que son parti est suspendu, et Aliou Bah (MoDeL) car il est en prison. Quelle est votre lecture ?
Nous pensons que ce sont des exclusions calculées. Tout est fait pour maintenir ces leaders dans une situation d’illégitimité, ou les empêcher carrément de se présenter. La suspension de l’UFDG, par exemple, a été décidée pour trois mois, et cette période couvrira jusqu’après les élections, prévues le 28 décembre. Nous pensons donc que c’est un calcul visant à maintenir certaines formations en dehors du jeu politique.
Concernant votre propre parti, peut-on s’attendre à une candidature de l’UDRP ?
Nous avons toujours dit que nous sommes en consultation avec notre base. C’est sur cette base, et à partir des leçons tirées, que nous déciderons d’un mandat à donner à un candidat, qu’il s’agisse du président du parti ou d’une autre personnalité. Je ne peux pas, en tant que président, décider seul de présenter une candidature. Nous attendons l’aval du parti.
Votre parti est membre de l’ANAD et des Forces vives. Vous aviez appelé à boycotter le référendum du 21 septembre. Vous êtes-vous concertés depuis l’annonce de l’élection présidentielle?
Non, pas encore. Depuis la fin du référendum, nous ne nous sommes pas concertés. Nous ne nous attendions pas à ce que les annonces s’enchaînent aussi rapidement. Il aurait été préférable d’attendre au moins le début de semaine pour informer, laisser le temps d’analyser, puis de prendre les décisions. Mais à ce rythme, on comprend bien qu’il y a des calculs derrière. Nous, de notre côté, allons d’abord consulter notre base et nous réunir dans les deux ou trois prochains jours afin de tirer les leçons et adopter une position.