«Mémoire collective, une histoire plurielle des violences politiques en Guinée» est un livre né d’un partenariat entre la RFI et la FIDH. Il a été lancé ce mardi 25 septembre au Palais du peuple à Conakry en présence des membres du gouvernement, acteurs politiques, diplomates, société civile.
La cérémonie s’est déroulée dans la salle de Congrès au Palais du Peuple. Au podium, notamment, le ministre de l’Unité nationale et de la Citoyenneté, Gassama Diaby, l’ambassadeur de l’Union européenne en Guinée, Josep Coll, des défenseurs des droits humains et des rescapés du Camp Boiro.
L’animation, sous la houlette de RFI, est assurée par Juan Gomez. Ouvrant le débat, le ministre Diaby souligne « la difficulté à faire émerger une mémoire collective en Guinée (…) Nous n’aimons pas la justice sauf quand ça nous concerne. Ce pays est triste et attristant», s’indigne-t-il.
Après plusieurs témoignages, vient celui de Mouctar Bah correspondant de RFI qui a expliqué son entretien avec une vieille ayant participé à la révolte des femmes contre la police économique de Sékou Touré. Depuis son siège, le doyen Biro Kanté, compagnon de l’indépendance, n’est pas satisfait du récit.
L’ayant observé, le ministre Gassama reprend une seconde fois la parole pour calmer la situation. «Je voudrais rappeler que pour parler de l’histoire, il y a un certain nombre de précautions préalables et cela a déjà été évoqué. Il faut désethniciser le procès. Ce n’est pas le procès d’une communauté, c’est le procès d’un système et je voudrais d’ailleurs rappeler qu’au-delà de l’histoire y compris aujourd’hui, les systèmes ne sont jamais des identités… La deuxième des choses, l’histoire n’est pas une religion, ce n’est pas une question de foi. Deux personnes différentes peuvent avoir des regards différents sur l’histoire. Et je voudrais dire y compris dans les familles, des frères et des sœurs peuvent avoir des regards différents sur leurs parents. Je voudrais dans cette démarche de l’histoire, puisque j’ai senti la tension, j’ai vu le doyen Kanté qui n’était pas très content pour certaines choses. Je voudrais respectueusement l’appeler. Il faut, dans notre pays, accepter d’entendre des choses avec lesquelles on n’est pas d’accord», conseille le ministre avant de demander que la parole soit donnée aux compagnons de l’indépendance aussi.
«Il y a dans cette salle certains compagnons de l’indépendance. Je plaide à ce qu’ils puissent prendre la parole pour nous parler du président Sékou Touré. Parce que si on veut l’histoire, il faut le faire sous différents regards».
C’est ainsi le doyen Biro Kanté, ayant déjà pris place au présidium, a pris le micro pour témoigner en ces termes. «Je n’ai jamais été d’accord pour parler de réconciliation nationale parce qu’on n’a jamais vu peuls et malinkés prendre des fusils les uns contre les autres depuis la colonisation jusqu’aujourd’hui. On n’a jamais vu les soussous prendre des fusils contre les peuls ou contre les malinkés», estime-t-il.
A ces mots, on a entendu de «houlaa !» et ressenti une tension parmi le public. Assis côte à côte, au fonds de la salle, deux personnes en viennent aux coups de points. L’un reproche à l’autre d’avoir qualifié de «faux» le témoignage de vieux Kanté. Le pire a été évité grâce à l’intervention de la sécurité qui a éconduit les deux bagarreurs.
Le tohu-bohu se transporte au balcon où un groupuscule dénonce l’ouvrage qui à ses yeux constitue «une falsification de l’histoire de la Guinée».