La nomination de Kassory Fofana à la Primature vient ainsi bousculer le paysage politique guinéen. Elle brise le rêve du Rpg originel, fout la trouille à l’UFR et inquiète l’Ufdg.
La fusion du parti Guinée pour tous (Gpt) dans le Rpg Arc-en-ciel était l’ultime condition à remplir par Kassory Fofana pour devenir Premier ministre. Puisque les caciques du Rpg Arc-en-ciel tenaient à ce que, cette fois-ci, la Primature revienne à un des leurs.
N’ayant pas eu donc le choix que de répondre favorablement à cette exigence pour ne pas susciter le courroux de son propre camp contre lui, Alpha Condé aura convaincu Kassory Fofana de faire la fusion pour ainsi correspondre à l’exigence du Rpg Arc-en-ciel et pouvoir bénéficier du décret le nommant à la Primature.
Le rêve brisé du Rpg originel
Même si les responsables du Rpg Arc-en-ciel n’ont pas encore exprimé officiellement leur désapprobation par rapport à cette fusion, les militants, eux, l’ont fait à travers les réseaux sociaux. Convaincus qu’«aussi longtemps que dure un bois dans l’eau, il ne sera jamais un caïman», pour eux donc, «le Premier ministre Kassory Fofana est un Rpgiste de circonstance» et le considère comme «un opportuniste» venu «briser le rêve» de nombreux cadres du parti au pouvoir d’occuper la Primature.
Voilà qu’à la veille de la fin de son second (et dernier ?) mandat, Alpha Condé inflige un coup terrible aux «Rpgistes de souche qui espéraient que la Primature leur revienne de droit». Ils ont été pris de court par le changement opéré sur la scène politique. La Realpolitik a eu raison. Il ne leur reste plus qu’à espérer obtenir le contrôle de quelques ministères.
Sidya et Cellou ont la trouille
Pour la petite histoire, l’on se souvient qu’en 1996, Sidya Touré était Premier ministre, Ibrahima Kassory Fofana, ministre du Budget et du Secteur Parapublic et Cellou Dalein Diallo, ministre des Transports, des Télécommunications et du Tourisme. Diallo deviendra plus tard Premier ministre du 9 décembre 2004 au 5 avril 2006.
C’était donc un rêve pour Kassory Fofana de devenir Premier ministre pour se hisser au même grade que Sidya Touré et Cellou Dalein Diallo et aussi Lansana Kouyaté qui sont tous à la conquête de la magistrature suprême.
Déjà, la cohabitation entre Kassory jusque-là ministre d’Etat à la Présidence chargé du Partenariat public-privé et le Haut représentant du chef de l’Etat, Sidya Touré, n’a pas été bonne. A des nombreuses fois, il a fallu l’implication du chef de l’Etat pour calmer les nerfs et éviter une friction autour de lui.
Même si son parti, Gpt, n’avait pas une forte assise politique comme l’UFR et l’Ufdg, Kassory dispose désormais d’une marge de manœuvre pour redorer son blason sur l’échiquier politique. Chef du gouvernement, il est aussi président du dialogue social.
Si Alpha Condé venait à respecter la Constitution- un mandat de 5 ans renouvelable une fois- le nouveau Premier ministre, s’il restait en poste jusqu’en 2020, pourrait être le dauphin du président sortant et espérerait briguer la Présidence de la République.
L’autre scénario possible c’est que si Alpha Condé arrivait à vouloir modifier la Constitution pour s’offrir un 3e mandat, il pourrait donc compter, en retour, sur un soutien de son Premier ministre qui a annoncé «renoncer au pouvoir pour soutenir le président de la République».
Retour possible à l’alliance Cellou-Sidya
Face à cette dernière évolution du paysage politique, il faut bien s’attendre à un éventuel rapprochement entre l’Ufr et l’Ufdg. Car, le scénario de l’entre deux tours de la présidentielle de 2010, à quelques exceptions près, est en train de se reproduire.
Battu par Cellou Dalein Diallo pendant le premier tour 44% contre 18%, Alpha Condé avait constitué l’alliance Arc-en-ciel- un regroupement des plusieurs «petits partis politiques»- qui lui avait permis de gagner au second tour.
La récente fusion des partis politiques, Gpt de Kassory Fofana, Pnr de Boubacar Barry et de l’Unr de Souelymane Bah Fisher dans le Rpg Arc-en-ciel et le rapprochement des NFD de Mouctar Diallo au parti au pouvoir en sont donc une parfaite illustration du scénario de 2010.
A l’époque, Cellou Dalein Diallo, fort de sa large victoire au premier tour, s’était contenté de son alliance avec Sidya Touré et sa déception fut grande. Toutefois, l’UFR et l’Ufdg pourraient partir sur des nouvelles bases pour former une solide alliance en prélude à la présidentielle de 2020. La politique étant un monde difficile à cerner, l’avenir nous édifiera.