Poursuivi pour « faux et usage de faux en écriture publique et complicité », Ibrahim Akhlal a été placé sous mandat de dépôt, le 27 décembre 2022, à la Maison centrale de Conakry. Ce belgo-marocain s’y est évadé dans la journée du 5 juin 2023. Son évasion a entraîné la suspension du régisseur et l’arrestation de 4 gardes pénitentiaires et 2 médecins, actuellement détenus à la prison de Dubréka.
Un mois après les faits, un garde pénitentiaire a accepté de relater le scénario de cette évasion à Guinee360.com. Il explique que le 5 juin, il faisait partie des gardes pénitentiaires déployés pour la sécurisation du procès du 28 septembre 2009. « Le lundi 5 juin, l’audience a été renvoyée. Je suis revenu à la Maison centrale un peu fatigué et je suis allé directement me coucher sur le lit à la rentrée de la prison. Vers 16h, Dr Ousmane Cissé est venu me réveiller en me demandant de l’accompagner à l’hôpital. Malgré son insistance, j’ai refusé. Le chef de poste, Honoré Tolno, est venu lui aussi me supplier de les accompagner. J’ai fini par accepter. J’ai positionné l’ambulance, ils se sont embarqués avec le détenu. Avant le départ, le médecin s’est disputé avec les agents d’escorte qui voulaient que le détenu reste assis derrière avec eux. Le médecin a répondu que c’est son malade et qu’il doit rester avec lui devant ».
Arrivé au niveau du grand portail, précise notre source, le chauffeur Ibrahima Sory Kindia Sylla a pris soin de demander la destination sachant que d’habitude c’est entre l’hôpital Ignace Deen et celui de Donka. « Dr Cissé a répondu que, cette fois-ci c’est dans une clinique dentaire située vers la Fédération guinéenne de football dans le quartier Teminetaye alors que dans le bulletin médical, c’est l’hôpital Ignace Deen qui était mentionné. Deux agents étaient assis derrière. Nous tous, nous ne connaissions pas cette clinique. Quand on est arrivé sur les lieux, la cour était déjà ouverte. Dès qu’on est entré, l’ambulance n’était même garée, le médecin a ouvert la portière et le détenu l’a bousculé pour descendre en trombe. Derrière, les gardes aussi sont descendus. Je les ai suivis et la course-poursuite s’est engagée sur la corniche », relate le témoin.
Arrivé au niveau de l’immeuble POKOU, situé derrière la station de Téminetaye, notre informateur dit avoir constaté la présence de deux motards aux alentours. «Lorsque je suis arrivé tout près du fugitif, un homme blanc est sorti devant moi et m’a aspergé du gaz. Je ne voyais plus rien. Honoré est venu me dépasser en criant. Le fugitif est monté sur la moto avec deux autres qui l’attendaient et ils sont partis. Ils ont pris la route qui passe devant l’entrée principale du camp Samory. Le deuxième motard a pris la route qui passe devant Nostalgie ».
De retour à la Maison centrale, compte rendu est fait au régisseur. Quelques temps après, le Directeur de l’administration pénitentiaire et le Secrétaire général des services judiciaires sont venus s’enquérir des détails de cette évasion. Aux dires de notre source, ils ont reconnu que le chauffeur n’avait rien à voir dans cette situation ne pouvant pas être conducteur et agent de sécurité en même temps.
Toutefois, vers 19 heures, le procureur général près la Cour d’appel de Conakry est venu les embarquer tous y compris le médecin chef de la Maison centrale, Issiagha Aboubacar Camara, pour le Haut commandement de la gendarmerie où ils sont restés en garde à vue pendant 10 jours. Le 11e jour, un vendredi, ils ont été transférés par devant le Tribunal de Kaloum. Le procureur a dit qu’il n’est pas prêt à recevoir le dossier. C’est ainsi qu’ils ont été retournés au Haut commandement d’où ils sont venus. Le lundi suivant, Cdt Mamadou Alpha Ndiaye, Ibrahima Sory Kindia Sylla, Saa Honoré Tolno, Noumouké Camara, Dr Issiagha Aboubacar Camara et l’infirmier, Ousmane Cissé ont tous été placés sous mandat de dépôt. Le 7e qui est le médecin qui devait recevoir le malade à la clinique a bénéficié d’un contrôle judiciaire. Celui-ci a expliqué qu’il ne voulait pas recevoir le détenu, mais qu’il a accepté à cause de l’insistance de Dr Cissé.
Ibrahim Akhlal est un repris de justice. Condamné à 21 ans de prison pour vol de diamant en Belgique, il s’est évadé de la prison de Saint-Gilles en 2020.
Il a ensuite été inscrit sur la liste internationale pour son implication dans un violent braquage d’un transport d’or en mai 2021 à Amsterdam. Des hommes masqués et armés avaient alors menacé le personnel avant de s’enfuir à bord de plusieurs voitures avec des lingots d’or et d’autres minerais précieux d’une valeur de 12 millions d’euros.