Même si elle est passée sous silence, la menace qui pèse sur les journalistes en général et les femmes journalistes en particulier est réelle. Tant dans les rédactions que sur le terrain, elles sont victimes des stéréotypes et de harcèlement sexuel. D’où la session de formation de 20 journalistes dont 11 femmes venus des médias publics et privés sur «la Sécurité et l’égalité de genre» du 13 au 14 septembre 2019 à Conakry.
Organisé par l’Association des journalistes de Guinée (AJG) en partenariat avec l’Union norvégienne des journalistes et le bureau Afrique de la Fédération internationale des journalistes, cet atelier, le 3e du genre en Guinée à la suite de la formation des formatrices à Dakar en 2017, s’inscrit dans le cadre du renforcement de capacité des journalistes des médias publics et privés.
«Comprendre la notion de genre», cette session présentée par la 3e vice-présidente de l’AJG, Mme Denise Diaby, a permis aux participants de faire la différence entre le «Genre» qui est sociologique et qui informe sur les rôles, les statuts et les pouvoirs assignés aux hommes et aux femmes et le «sexe» qui est un attribut physique inné à l’Homme.
L’équité et l’égalité sont deux notions dont on parle souvent de manière indifférenciée, a expliqué la facilitatrice, la première chose est le fait d’avoir un traitement différencié entre femmes et hommes pour corriger des inégalités de départ et atteindre l’égalité. Tandis que la seconde est le fait de fournir aux femmes et aux hommes les mêmes droits, opportunités et ressources dans tous les domaines.
«La non prise en compte du genre est source d’inégalité», a indiqué M. Muyimona Kabuyah qui abordait le thème «Genre et médias». En parlant des stéréotypes sexuels, le consultant a fait constater que quand les femmes figurent dans les médias, elles sont le plus souvent représentées comme des objets sexuels, de beauté, des femmes au foyer ou encore comme des victimes de violence, de la pauvreté et de conflits. Alors que les nouvelles sur les violations des droits fondamentaux des femmes et sur la discrimination envers elles sont peu nombreuses et peu fréquentes. «Lorsque les médias couvrent des questions concernant les femmes comme la violence, la santé sexuelle, les femmes ayant pouvoir de décision, ces articles sont relégués à des pages ou segments spéciaux dans les médias et présentés sous la rubrique «questions féminines» plutôt d’être placés aux pages des nouvelles qui concernent tout le monde», a-t-il déploré.
Sachant que les messages véhiculés à travers les journaux, les sites internet, la radio et la télé peuvent soit renforcer les stéréotypes sexuels soit les remettre en cause, pour remédier à la discrimination basée sur le sexe, M. Kabuyah a suggéré l’intervention en faveur de l’égalité des sexes dans les médias à travers le lobbying, la sensibilisation, la recherche, la formation, le monitorage des médias et l’organisation d’activités qui créent des alliances en vue de promouvoir les droits des femmes et l’égalité dans et à travers les médias.
Vu les nombreuses menaces auxquelles les femmes journalistes sont confrontées, les participants ont eu droit à une session portant sur «la sécurité de genre sur le terrain» qui a été ponctuée par des exercices pratiques et de partage d’expérience des anciens comme Mme Kadiatou Thierno Diallo et de M. Alpha Kabinet Doumbouya, tous membres de l’AJG.
Les participants ont appris des astuces susceptibles de les aider à mieux comprendre les problèmes de sécurité et de sûreté auxquels ils peuvent être confrontés et ils savent désormais évaluer, établir les faits, découvrir l’objectif et la source d’une menace les concernant.
Au cours de la session «accepter la différence et faire face à la discrimination» animée par Mme Kadiatou Thierno Diallo, les journalistes ont été séparés en deux groupes selon le sexe. Des oranges ont été remises aux hommes et des pommes aux femmes. Ainsi, après avoir épluché une des oranges, la facilitatrice l’a placée au milieu des pommes afin de pouvoir expliquer de manière illustrée l’humiliation que subie la femme journaliste dans les différentes rédactions.
«Une femme instruite est moins fragile qu’une femme non scolarisée», a mentionné Mme Denise en incitant les femmes journalistes à se former davantage pour briser la discrimination et le harcèlement dont elles subissent en milieu de travail.
Au cours de cette session, une des participantes a également livré un témoignage sur un cas de harcèlement dont elle a fait l’objet de la part d’un de ses confrères à qui elle s’était promis de se marier et qui avait continué à lui faire des avances après l’échec de leur projet de mariage. Elle a expliqué avoir déserté la rédaction pendant plusieurs jours à cause du poids de la pression qu’elle subissait avant de se décider à informer sa hiérarchie.
Au terme de la formation, le président de l’AJG, M. Fodé Bouyah a exprimé un sentiment de satisfaction et s’est engagé à pérenniser ce genre de formation pour que, a-t-il dit, la discrimination basée sur le genre et de harcèlement trouvent leurs solutions dans le temps. Il a encouragé les participants à restituer les connaissances acquises dans leurs rédactions respectives.