Mme Barry née Issa Sy est diplômée en pharmacie de l’université guinéenne. Handicapée des membres supérieurs et inférieurs, elle peine à se faire embaucher par les tenanciers de pharmacie.
Assise sur la véranda de la maison où elle habite avec sa petite famille à Bentourayah, dans la préfecture de Coyah, Issa Sy revient sur sa scolarité qui n’a pas du tout été facile, vu l’opposition de son père biologique. Elle a mis ses pieds pour la première à l’école, en 2001, à l’âge de 14 ans. « Mon Papa a scolarisé six de ses enfants. Il a refusé que je sois aussi scolarisée comme mes frères et sœurs. Il a fallu que j’observe une grève de faim pendant deux jours, pour que mon papa accepte que je sois inscrite à l’école», se souvient-elle, heureuse de voir son pressing a porté fruit. Son handicap, c’était la raison pour laquelle son père n’avait pas voulu qu’elle aille à l’école. Mais Issa étant ferme sur son envie d’étudier, son père ne pouvait que céder à sa pression.
Du primaire en passant par le collège jusqu’à à l’obtention du baccalauréat, dans la préfecture de Dinguiraye, Issa Sy a toujours été parmi les meilleurs de sa classe. Avec les maigres moyens de sa maman, elle a été contrainte de faire deux années blanches. Chose qui ne l’a jamais découragée à se battre pour continuer ses études. « Ma maman a vendu deux de ses draps de lit, qu’elle n’avait pas utilisé, pour me permettre de reprendre le chemin de l’école», rappelle-t-elle.
Une femme au mental d’acier
Elle reprend les cours en 12e année en pleine forme, puis prépare son baccalauréat qu’elle obtient avec mention «Excellent», après avoir obtenu de très bonnes notes : 16 en Chimie, 17 en Physique et 14 en Biologie.
Courageuse et déterminée à aller jusqu’au bout, Issa Sy n’a pas cédé à la pression de ses frères aînés qui se sont aussi opposés à la continuation de ses études. Pour briser son rêve, ses quatre frères lui ont proposé en mariage à un homme riche : «Ils m’ont proposée en mariage à un homme à cause de sa richesse, sans même mon consentement. J’ai proposé au monsieur de me laisser terminer mes études, mais il a refusé, en me disant que les femmes instruites n’ont aucun respect pour leurs époux. J’ai compris qu’il ne m’aimait pas. Donc, je me suis opposée [à ce mariage].»
Après avoir obtenu le baccalauréat, cette dame au teint noir a décidé de faire la Pharmacie, pour le but, dit-elle «d’aider les populations. Parce qu’en étant pharmacienne, je peux facilement aider les gens à se faire soigner selon leurs catégories d’âges.»
Orientée dans une université privée de la place, la dame invalide était obligée de monter les escaliers jusqu’au quatrième étage, pour suivre ses cours. Durant des années, elle a vécu pas mal de souffrances, mais elle a tenu bon, juste pour réaliser son rêve. Celui de devenir une pharmacienne. Elle vient d’obtenir son diplôme de licence, après avoir défendu une thèse et obtenu la mention «Très honorable.»
Les stigmatisations, autre frein à son élan
Aujourd’hui, la Technicienne de labo n’a pas dit encore au revoir aux souffrances liées à la quête du bien-être. Malgré l’obtention de son diplôme, elle dit être rejetée par bon nombre d’employeur à cause de son handicap physique: «C’est maintenant là que je rencontre des difficultés qui me dépassent. J’ai envoyé des demandes dans certaines officines, les propriétaires m’ont dit que comme je suis handicapée, je ne mérite pas d’être employée, parce qu’il y a des personnes valides qui peuvent mieux faire que moi. Chose qui me touche beaucoup, mais, je m’en remets à la volonté divine.»
Elle demande aux autorités et aux personnes de bonnes volontés de lui venir en aide, afin qu’elle puisse vivre de ce qu’elle a appris sur le banc. « Je ne vais jamais mendier pour vivre», lance-t-elle, lames aux yeux.