Âgée de 42 ans, Mme Sow Fatimatou Diallo a comparu devant le tribunal criminel de Dixinn ce mercredi 12 avril 2023, pour témoigner sur la mort de son époux qui a été tué au stade lors du massacre en 2009.
A la barre, Fatimatou Diallo a relaté les derniers instants vécus avec son mari Mamadou SOW. Selon elle, il est sorti à la maison dans la matinée du 28 septembre pour aller assister au meeting des leaders politiques. Confiant, Mamadou SOW a pris son petit déjeuner et a rassuré son épouse qu’il rentrerait très tôt puisqu’il ne va pas à Madina (son lieu de travail) comme d’habitude. En sortant, elle raconte qu’il a pris leur petit bébé qui avait juste une année et 4 mois dans ses bras jusqu’au portail.
« Quand il est arrivé au niveau du marché Koloma, il m’a appelé pour m’informer qu’il y a énormément de monde à ce niveau. Vers 10 heures, il m’a encore rappelé pour me dire qu’il est à la rentrée du stade en compagnie de son petit frère. Après ça je n’ai plus eu le courage de lui rappeler parce que j’étais en panique. Il m’a rappelé quelque temps après pour m’expliquer que le stade est bondé de monde, je lui ai dit de sortir et chercher à revenir à la maison maintenant, il m’a dit d’accord qu’il revient tout à l’heure, J’ai échangé avec mon mari pour la dernière fois à 11 heures et la dernière chose qu’il m’a demandé, c’est s’il y avait le courant à la maison », raconte Fatimatou Diallo en larmes.
Ensuite, n’ayant pas eu de nouvelles de son mari après plusieurs heures, Fatimatou Diallo aurait appris enfin la mort de son mari par le biais de sa belle-sœur. Son téléphone sonne et c’est elle (Hadja Aïssatou) qui habite Lambagni qui l’annonce la mauvaise nouvelle.
« J’ai reçu un appel de ma belle-sœur qui est à Lambangni, me demandant si je suis au courant qu’ils ont tiré sur l’oncle Elhadj. J’ai répondu en disant : quoi ? Elle a raccroché le téléphone quand elle a su que je n’étais pas au courant. J’étais en panique ne pouvant rien faire même sortir de la maison. Je l’appelle (sa belle-sœur NDLR) fatigué et personne ne répondait. Je me suis rappelé que son grand frère est à côté. J’ai appelé mon beau-frère Boubacar (paix à son âme) pour lui dire d’aller se renseigner sur l’information que m’a donnée ma belle-sœur, quelque temps après, il m’a rappelé pour me confirmer qu’ils ont tiré sur mon mari au stade et qu’il est même décédé.
Son petit frère avec qui il était ne connaissait pas trop la ville. Il est revenu dormir à Bomboli où ils avaient garé la voiture en partant au stade. Il a rencontré un des amis de mon mari (Malal) avec qui il travaille à Madina qui lui a remis les clés du magasin de mon mari. Il dit : “Voici les clés de ton mari si vous voulez le cherche aller à la morgue. J’ai vu le grand couché, agonisant et la salive sortait de sa bouche”.
Ce sont eux qui ont aligné les corps au niveau du stade. Il avait vu mon mari, son collègue (de circonstance) lui dit : prenons celui-ci, mais il ( Malal NRLR) dit : prenons cet autre d’abord. Après, ils sont revenus prendre le corps de mon mari pour l’envoyer là où les autres corps étaient alignés. Il l’a fouillé. Il a trouvé avec lui son permis de conduire et les clés. Il a pris les clés et a remis au jeune frère de mon mari. Quand il lui a annoncé le décès, celui-ci n’y croyait pas. Il le secoua en insistant : qu’est-ce que tu dis ? Il répondit : “prends sa clé”.
Quand il (le jeune frère de mon mari NRLR) a pris les clés, il n’est pas rentré à la maison ce lundi. Il y a passé la nuit. On échangeait au téléphone. Mais il n’a pas accepté de nous raconter ce que l’autre l’a dit. Il voulait lui-même constater le décès.
Le lendemain (mardi) à 6 ,heures je suis sortie… J’ai eu le taxi difficilement. Je suis venu à Donka. Dès mon arrivée, le jeune frère de mon mari qui n’était pas rentré à la maison avait déjà informé toute la famille de se retrouver là. A la porte j’ai trouvé le jeune (Malal). Il dit ton mari, c’est les clés qu’on a récupérées et on les a rendues à son jeune frère. J’ai dit directement Elhadj (son mari) est mort. J’ai trouvé toute la famille à l’hôpital. Dès qu’on m’a vu tout le monde s’est mis à pleurer. Ils ont décidé de ne pas me laisser là-bas. On m’a renvoyé à la maison.
On n’a pas retrouvé le corps. La famille est venue à la mosquée Fayçal le jour de la restitution des corps. Elle ne l’a pas retrouvé. C’était un vendredi. Donc, on est rentré. Et, puisqu’on ne l’a pas retrouvé le samedi il était question d’aller à Kindia pour faire le sacrifice. On a fait le veuvage là-bas, ma coépouse et moi. De là, nous sommes revenus à Conakry », a raconté Fatimatou Diallo.