Et puis qu’il nous est venu à l’idée d’analyser la crise sociale que nous vivons en ce moment en Guinée, crise, essentiellement centrée autour des revendications salariales orchestrées par le syndicat des enseignants, allons tout droit sur la véracité principale dont prolifèrent tous les autres.
D’entrée de jeu, il faut savoir que, l’augmentation des salaires a un impact considérable et positif sur l’épargne mais aussi la consommation des ménages occasionnant à son tour une hausse mécanique du Produit Intérieur Brut (PIB). Cette hausse de la consommation entraine à son tour plus d’entrée de TVA.
Plus de salaires, c’est plus d’impôts sur le revenu et cotisations sociales perçue sur les profits des entreprises. Ainsi la hausse des rentrées fiscales et sociales donne alors des marges de manœuvre pour se désendetter et/ou pour financer la croissance des dépenses publiques : transferts sociaux qui soutiennent la consommation des ménages, création d’emplois publics et investissement public qui permet notamment de rendre l’environnement plus favorable à l’offre : infrastructures, éducation, recherche fondamentale qui sont autant sources de productivité supplémentaires. La hausse de la demande publique participe à son tour à la croissance du PIB.
Une étude portant sur « l’impact des politiques monétaire et budgétaire sur la croissance économique en Guinée » réalisée par nos soins en 2014 (cf. Rapport de stage BCRG), a montré que l’élasticité de court terme du produit intérieur brut par rapport aux dépenses totales est de -0.06, ceci implique qu’à court terme, si les dépenses totales augmentent de 10 %, le produit intérieur brut diminue de 0.6 %. Donc, en Guinée, les dépenses publiques n’ont aucune incidence positive sur l’économie, à cause de leur caractère improductif, et elles ont surtout servi à rembourser la dette qui représentait en 2010, 67,7% du PIB (soit 3061,7milliard de dollar). Ce résultat ne corrobore point la thèse keynésienne sur l’importance de la politique budgétaire et celui obtenu par Koné (2000).
S’agissant des dépenses totales, elles n’ont pas du tout d’impact significatif à long terme sur la croissance économique. Les mauvaises performances des dépenses totales en termes de croissance pourraient être expliquées entre autres «par une mauvaise gouvernance et l’absence de règles dans la gestion des finances publiques» mais surtout par «l’insuffisante accumulation du capital public et sa faible productivité…»
Cela montre à suffisance que notre économie serait plus prospère si elle réduit la taille de son État mais aussi les dépenses extra budgétaires. Un simple assainissement des finances publiques pourrait servir à payer une majeure partie des fonctionnaires de l’Etat et/ou à faire face à légalité des revendications syndicales sans pour autant recourir à des politiques impopulaires tels que la hausse de la RTS précédemment annoncée.
Toutefois, il convient de noter qu’une rémunération excessive du secteur public, facteur de distorsions à l’échelle de l’économie rend le pays moins concurrentiel et entraînent une croissance économique plus lente et une inflation élevée.
De plus, cette mesure pousse également les employeurs privés à augmenter les salaires, mais d’une manière qui n’est pas soutenable au regard des niveaux sous-jacents de productivité. Mais lorsque les pressions budgétaires forcent les responsables politiques à freiner les rémunérations excessives des fonctionnaires, cela permet au secteur privé d’avoir des niveaux de salaire compatibles avec une croissance soutenable à long terme.
En somme, cette petite analyse n’a pas pour ambition la remise en cause les fondements théoriques de la macroéconomie, plus particulièrement les diverses théories traitant la question salariale. Elle ne prétend non plus remettre en cause la bataille menée par les vaillants syndicats de l’enseignement dans le cadre du respect de leurs droits légaux que nous soutenons avec fermeté en tant qu’Enseignant-Chercheur. Mais, elle se veut tout simplement une contribution à l’avancement de notre cher Guinée dans son combat vers un développement durable.
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Mamadou Safayiou DIALLO
Analyste Économique
Enseignant-Chercheur
Membre du CRED.