Dans un entretien accordé à notre rédaction, l’ancien président de la Commission santé à l’Assemblée nationale (huitième législature) a lancé un cri de cœur pour la libération des détenus politiques. Il a également demandé à Alpha Condé de faire des efforts pour que les six prochaines années soient des années de paix, de développement et de prospérité pour tout le peuple de Guinée.
Guinee360: Quel rétrospective pouvez-vous faire de l’année 2020 notamment sur la situation politique en Guinée?
Dr Ben Youssouf Keita: Sur le plan politique, c’est fut une année catastrophique. Il y a eu beaucoup de guinéens qui sont morts pour des raisons politiques lors des différentes manifestations, notamment contre le double scrutin législatif et référendaire, l’élection présidentielle du 18 octobre, affrontements inter-communautaires. Nos pensées pieuses pour les compatriotes morts à N’Zérékoré, Bambeto, Macenta pour ne citer que ceux-ci. Un guinéen mort est une mort de trop. L’année 2020 a été année de misère. Le tissu social a été ébranlé, le climat politique a été malmené, l’économie affaissée. Jusqu’à présent, nous ressentons. Parce qu’au moment où nous sommes en train de parler, pour des raisons politiques, il y a encore des Guinéens qui sont emprisonnés à la maison centrale. Il y a des Guinéens encore pour des raisons politiques qui ont payé de leur vie. Donc, l’année 2020 est une année noire sur le plan politique, tout comme le plan de la santé avec le Coronavirus.
Depuis la détention de Chérif Bah et Cie, nous constatons que le parti communique moins il y a moins, plusieurs observateurs estiment que les cadres de l’UFDG ‘’ont peur’’ d’être emprisonnés. D’ailleurs, Ibrahima Sory Camara, un de vos militants a dénoncé cette attitude. Qu’en dites-vous ?
A mon avis, la sortie d’Ibrahima Sory n’a pas été constructive pour l’UFDG. Parce qu’il ne faut pas critiquer de manière publique vos collaborateurs, alors que vous pouvez discuter à l’interne. Vous devez savoir que les responsables de l’UFDG ont payé un lourd tribut pour l’instauration de la démocratie dans notre pays. Moi qui vous parle, j’ai subi la descente musclée de la police chez moi. 5 pickups y ont débarqué un vendredi soir pour m’amener à la DPJ. au pic du combat du FNDC, au mois de mars dernier. J’ai eu la chance, on ne m’a pas trouvé. Mais comme nul n’est au-dessus de la loi, je suis allé me présenter moi-même. Et ça, c’était dans le cadre politique au compte du FNDC. N’oubliez pas aussi, que les vice-présidents Fodé Oussou et Kalémodou Yansané ont été arrêtés et transportés à la DPJ en novembre dernier. En 2020, il y a eu beaucoup de manifestations, les responsables de l’UFDG en tête Cellou Dalein Diallo, ses vice-présidents et les députés que nous étions, avons été toujours en première ligne. Aujourd’hui certes, nous avons certains collègues en prison, mais cela ne doit pas faire qu’on traite, les autres qui sont en liberté de tous les noms d’oiseaux. Ils méritent respect et considération.
N’avez-vous pas peur d’aller en prison ?
Non, pas du tout. Le parti est structuré. Il y a une Cellule de communication, ce n’est pas n’importe qui, et à n’importe quel moment qu’il faut communiquer. Il y a une cellule de communication dirigée par Ousmane Gaoual Diallo qui était souvent dans les médias à cause de ses fonctions. Mais sinon, Fodé Oussou, Aliou Condé, Kalémodou et moi-même avons longtemps et depuis toujours intervenus sur les ondes des médias au même titre que le vice-président Chérif Bah, Cellou BALDÉ, Abdoulaye Bah, Etienne Soropogui Ismaël Condé, Madic Sans frontières etc…
J’ai un grand respect pour Ibrahima Sory parce que c’est un militant convaincu, combattant, un responsable engagé qui a souffert de la prison pendant près d’un an pour des raisons politiques. Il bénéficie d’une crédibilité et d’une attention particulière au niveau de l’UFDG, pour tout ce qu’il a subi, mais cela ne doit pas lui donner la l’attitude de critiquer à tout vent ses collaborateurs du parti sur la place publique. C’est une erreur et je pense qu’il ne répétera plus. L’erreur est humaine, mais persévérer devient diabolique. Il ne reprendra pas.
Quel avenir pour l’UFDG pour les six prochaines années ?
Je ne veux pas être un oiseau de mauvais augure. Six ans c’est long. N’oublions pas que le Pr Alpha Condé a lutté 40 ans avant d’accéder au pouvoir. Cependant, les temps et les époques ont changé. Et ce n’est plus les mêmes réalités ni les mêmes modes de conquête de pouvoir. Aujourd’hui c’est les urnes et rien que les urnes. Des longues années sans participer à aucune joute électorale, c’est difficile pour tout parti politique. De manière pragmatique, il est clair que tout parti politique a besoin de se faire entendre pour exister. Si vous n’êtes ni dans le législatif ni dans l’exécutif, vous devenez inaudible. (…) car le judiciaire est chapeauté par l’exécutif chez nous. Une fois de plus, le président de la République n’a qu’à poser des gestes forts en libérant les détenus politiques.
Tidjane Diallo