Le slam, cet art d’expression orale essentiellement poétique, commence à attirer les jeunes guinéens d’ici et d’ailleurs. Ibrahima Kalil Diakité, blogueur vivant en France, Yaya Ezail Kassé et Cheick d’Alfred, résidant à Conakry, font du Slam. Ils soutiennent qu’ils expriment tout ce qu’ils ressentent, éduquent et sensibilisent à travers le Slam.
Inventé pour la première fois aux Etats-Unis en 1986 par le poète Marc Smith, le slam est une pratique de l’écriture et de l’art oratoire qui allie poésie et spectacle vivant. Focalisé sur le verbe et l’expression brute, il se caractérise notamment par une économie de moyens, sur scène, ni décor ni costume. Une bouche qui donne, et des oreilles qui prennent. Un moyen de rendre la poésie plus vivante. Il peut avoir lieu partout où une rencontre peut se tenir, généralement dans des lieux publics ; que ce soit dans un bar, dans un restaurant, dans une bibliothèque ou dans la rue.
Ces dernières années, plusieurs jeunes africains, notamment des jeunes guinéens ,s’intéressent petit à petit au slam. Ibrahima Kalil Diakité, blogueur résidant en France est un d’eux. Le slam est pour lui un moyen d’expression de libres mots.
Amoureux de l’écriture, il a opté pour la poésie urbaine qu’est le slam pour mieux véhiculer ses messages : ‘’Je suis familier des mots mais la routine mène à l’ennui. Je voulais donc changer de style d’expression. Je voulais accrocher davantage les gens à ce que je dis. J’ai donc croisé le slam. Les gens sont plus à l’aise avec les images et la parole de vive voix qu’avec les écrits. C’est aussi une des raisons qui m’ont conduit vers le slam. Enfin il y a le reggae root, le rap de Kerry James, de Almighty et le slam de Jhonel, de Kmal Radji et de Harmony Byll qui ont joué leur influence aussi.’’
« Cet art est pour ce jeune ce qu’est un fusil pour un chasseur, déclare-t-il. C’est une arme que je charge de vers rimés pour atteindre une cible, cette cible c’est cette société décadente que nous vivons. Par le slam j’exprime les maux dont souffrent le prolétariat et j’éveille les consciences endormies. Par cet art je partage ma vision des choses.’’
Kalil DIAKITE dit soigner Les Maux par Les Mots :
‘’ Par le Slam je peins les maux
Dont souffrent les youth du ghetto
Ceux à qui on a tourné le dos
Le monde est trop sombre, je me sers du slam pour tirer les rideaux
Quand mon âme pleure, par le slam vous entendez son écho.’’
En Guinée, le slam est récent et peu connu. Cependant il y a plusieurs jeunes qui écrivent dans les coulisses, a fait remarquer le Slameur Yaya Ezail Kassé surnommé ‘’Le parolier du Sud’’
« La Guinée a des jeunes talents dans ce secteur, mais ils écrivent aussi dans leurs chambres comme moi je le faisais avant. Il fallait quelqu’un au-devant de la scène pour leur prouver que oui, nous pouvons le faire aussi’’, a-t-il ajouté.
Ce jeune guinéen fait du slam depuis 2014. Depuis, il a tenu plusieurs scènes qui, selon lui, lui ont valu des invitations à l’international : ‘’Je voulais ouvrir la voie à mes autres frères et amis slameurs, c’est comme ça avec le concours des serials rieurs qui m’ont offert plus d’une dizaine de scènes au Centre culturel franco-guinée (CCFG). J’ai pu multiplier les scènes et ça m’a valu aussi des voyages à l’extérieur de la Guinée.’’
Slamer implique non seulement la voix, mais aussi le corps. Yaya Kassé, dans son élan, le domaine, organise avec d’autres slameurs des formations en slam : ‘’En prélude aux sessions que nous organisons, on lance un appel à tous les écrivains en herbe qui veulent slamer, parce qu’il y a des principes et des règles à respecter pour ne pas quitter le cadre du slam. On organise des ateliers d’écriture. On les assiste au mieux qu’on peut. On ne peut apprendre quelqu’un à écrire mais on peut lui montrer le chemin.’’
Cheik D’Alfred, un autre slameur soutient que le Slam lui permet d’extérioriser ses sentiments. C’est la musique et le cinéma qui l’ont poussé à écrire. Il dénonce souvent les problèmes de la Guinée à travers les mots. Il a en ces mots parlé de la situation politique de la Guinée:
‘’Les problèmes politiques sont les problèmes de tout le monde
Les problèmes de tout le monde sont des problèmes politiques
La plèbe est incarcérée par sa propre liberté Parfois même, constitué en foule mécanisée
Sous les mauvais augures de nos dirigeants
Aux exigences affamée La folie des grandeurs est à l’ardeur
Le mensonge – la triche – l’ethnocentrisme -le manque de volonté politique
Sont les formes symboliques d’une société péril
Ils m’inspirent la division Parce qu’ils n’ont pas de vision
Les hommes politiques de mon état
Sont de véritables échecs politiques
Sur l’échiquier de la vie politique
J’accuse les politiques de domestiquer l’ambiguïté sémantique’’.
Yaya Ezail Kassé a sorti ce mercredi 15 novembre 2017 son premier single en slam intitulé ‘’La plume du parolier ‘’. Il est également retenu après un concours, pour représenter la Guinée au ‘’Slam Master Class Silo 2017’’ à Ougadougou au Burkina Faso du 23 au 26 novembre.
Ces jeunes slameurs utilisent beaucoup plus les réseaux sociaux pour véhiculer leurs messages et partager leurs écrits. Beaucoup d’autres jeunes commencent à s’intéresser à cet art oratoire, qui est un moyen d’amélioration des capacités rédactionnelles et analytiques des jeunes. Le slam, comme le stand-Up, est un genre culturel, qui est pour le moment peu connu du public guinéen.
